Abroger le calendrier d’interdiction de location des passoires thermiques : bonne ou mauvaise idée ?
Date de publication : 09/07/2024
Pour « fluidifier le marché du logement », le Rassemblement national (RN) propose d’abroger le calendrier d’interdiction de location des passoires thermiques. Jordan Bardella, président du RN, a confirmé cette mesure le 24 juin lors de la présentation de son programme législatif. Le RN souhaite « supprimer les contraintes posées par le diagnostic de performance énergétique (DPE) sur les locations ou la vente de biens immobiliers ». En clair, le parti entend mettre fin à l’interdiction de louer les logements classés F ou G, qui représentent 15,7 % du parc immobilier français. À partir du 1er janvier 2025, les logements notés G devraient être interdits à la location, une mesure déjà en place pour les G+ depuis le début de 2023, et prévue pour s’étendre aux F en 2028.
Des règles allégées, mais peu d’effets positifs
Le RN justifie cette suppression par l’argument que cela faciliterait l’accès au logement pour les locataires. Toutefois, cette perspective est contestée. Danyel Dubreuil, coordinateur de l’initiative « Rénovons ! » au sein de l’association Cler, affirme qu’aucune étude ne prouve que le DPE est responsable du manque de logements disponibles. Thomas Lefebvre, directeur scientifique de SeLoger/Meilleurs Agents, renchérit en précisant que la diminution de l’offre de location concerne tous les types de biens, et pas spécifiquement ceux notés F ou G.
Selon les experts, la pénurie de logements résulte principalement de l’arrêt de la construction neuve et de la hausse des taux de crédit. Ces facteurs contraignent les ménages à rester locataires plus longtemps, réduisant ainsi le taux de rotation des logements. Brice Lalonde, ancien ministre de l’Environnement, suggère qu’assouplir le calendrier de rénovation des logements aurait été une solution plus favorable aux locataires. En abrogeant l’interdiction de location des passoires thermiques, les locataires risquent de demeurer dans des logements mal isolés, exposés à des températures extrêmes et à des conditions insalubres. Danyel Dubreuil souligne que la précarité énergétique, où les locataires se privent de chauffage faute de moyens, est particulièrement concentrée dans les passoires thermiques, représentant un quart du marché locatif privé. Les propriétaires investissent peu dans ces biens, n’y résidant pas eux-mêmes et ne voyant pas d’intérêt à y améliorer les conditions de vie.
Conséquences sanitaires des logements mal isolés
Le Conseil d’analyse économique (CAE) a alerté sur les risques sanitaires liés aux logements mal isolés. Des températures basses peuvent entraîner des maladies cardiovasculaires et respiratoires, particulièrement chez les ménages financièrement contraints. En été, ces mêmes logements peuvent devenir des « bouilloires thermiques », augmentant les risques de déshydratation et de troubles du sommeil.
En somme, l’initiative du RN visant à abroger le calendrier d’interdiction de location des passoires thermiques pourrait aggraver les conditions de vie des locataires en les maintenant dans des logements énergétiquement inefficaces et potentiellement dangereux pour leur santé. Une approche plus équilibrée, visant à soutenir la rénovation énergétique, serait nécessaire pour réellement améliorer la situation du marché locatif et la qualité de vie des occupants.
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